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La disparition de Josef Mengele

Par Jean-Paul Bonjean

_« C’est pas parce qu’un homme aime ses enfants qu’il devrait avoir le droit de tuer n’importe qui » _(Hubert Selby Jr.)

La disparition de Josef Mengele

Le Docteur Mengele figure parmi les personnages les plus atroces de l’histoire du nazisme. Son exploitation des corps juifs à fin d’expérimentations cristallise la détestation populaire pour ce qu’elle comprend de cynisme, de cruauté voire de folie furieuse.

L’histoire qui nous est livrée ici est un récit biographique que l’auteur modélise sur un ton assez factuel. Et comme souvent, dans les affaires humaines, les choses sont plus complexes qu’il n’y paraît. Au monstre absolu se substitue au fil de la lecture une figure contrastée, certes pas sympathique mais faite de réflexes humains combinant des ambitions professionnelles, une vie de famille, des amours et une bonne éducation.

Le bouquin évoque plus particulièrement la période qui a suivi la guerre et durant laquelle le « docteur d’Auschwitz » fuit l’Allemagne. Dans un premier temps, il se réfugie en Argentine avec la bienveillance du régime péroniste. Selon la fluctuation des intérêts internationaux du Mossad, de la RFA et d’autres organismes, s’organise le road trip infâme de celui qui ne connaîtra plus la paix que dans une mort qui traîne en longueur.

À la manière d’Emmanuel Carrère dans Limonov ou de Javier Cercas dans Les Soldats de Salamine, l’auteur se penche sur un personnage politiquement problématique pour en restaurer un relief sans fausse pudeur et sans complaisance. L’auteur s’appuie sur un très long travail de documentation pour nous proposer cette histoire d’une cavale honteuse faite de hasards autant que de volonté partisane.

Olivier GUEZ, La Disparition de Josef Mengele, Grasset & Fasquelle, 2017 – Prix Renaudot 2017